Des TEE aux TGV Thalys

Paris-Bruxelles : 175 ans d'histoire

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Des TEE aux TGV Thalys Paris-Bruxelles : 175 ans d'histoire

Transcription :

Paris-Bruxelles, c'est la colonne vertébrale d'un réseau de trains à grande vitesse qui irrigue les pays limitrophes de la France accessibles depuis la gare du Nord. Une liaison qui a été initiée il y a plus de 175 ans et qui a longtemps vu passer les célèbres trains Trans Europe Express avant de céder la place à des TGV. Histoire de voir à quoi ressemble ce voyage, on va emprunter l'un d'entre eux aujourd'hui, à Paris, à destination de Bruxelles-Midi. On aurait pu aller plus loin, car ce sont au total près d'une 15 aine de grandes gares de Belgique, d'Allemagne ou encore des Pays-Bas qui sont desservies

sans compter quelques destinations saisonnières en hiver et en été qui amènent des touristes du nord de l'Europe, directement au pied des pistes de ski, ou dans le sud de la France. Malgré cela, il faut le savoir Thalys est une marque qui est amenée à disparaître. Pourquoi ? Que deviendront les rames TGV rouges dont une bonne partie est en cours de rénovation ? Par quel service les TGV Thalys seront-ils remplacés ? On voit ça dans les minutes qui viennent. Bonjour et bienvenue dans Aiguillages !

En France, la principale gare de départ pour les TGV Thalys, c'est celle du Nord à Paris. Une 20aine de trains l'a quittent chaque jour. Trois classes de tarifs sont proposés à la réservation : Standard, Comfort et Premium. Pour un trajet jusqu'à Bruxelles, les prix varient de 29 à 155 euros pour une réservation assez éloignée dans le temps, 103 à 155 euros pour un départ dans les jours à venir. Quelque soit la catégorie choisie, il est possible d'emmener deux valises et un bagage à main. En classe standard, vous bénéficierez d'un accès wifi gratuit et d'une prise électrique individuelle. La classe Comfort vous donne accès en plus à un wifi au débit plus rapide et des sièges plus larges. En mode Premium, vous bénéficierez également d'un repas servi à la place, vous pourrez consulter la presse internationale via une application dédiée, et accéder à des salles d'attente qui vous seront réservées à Paris, Bruxelles, Cologne et Düsseldorf, si vous débutez votre voyage en Allemagne. Enfin, il vous sera possible de réserver un taxi ou un VTC.

Les TGV Thalys sont apparus en 1995, pour substituer la grande vitesse aux Trains roulant jusqu'alors sur les lignes classiques : Les tains Trans Europe Express.

Mais l'histoire de la liaison Paris-Bruxelles a commencées bien avant, précisément les 14 et 15 juin 1846. Ce premier trajet sur cet axe, a été réalisé en deux jours. Il fallait alors 14 heures pour parcourir les 370 km séparant les deux capitales. Le train inaugural a par conséquent passé la nuit à Lille. Par la suite, la vitesse sur cette relation n'a fait que croître. En 1853, il ne fallait déjà plus que 8 heures pour faire le trajet, en 1920, 3h45 seulement. Entre temps, la Compagnie Internationale des Wagon Lits y introduit ses premiers trains de luxe : l'Etoile du Nord entre Paris et Amsterdam, via Bruxelles, le Nord Express qui assurait la relation Paris-Saint Pétersbourg, toujours en passant par la capitale Belge, l'Oiseau bleu qui reliait Paris à Bruxelles et Anvers. Des trains qui bien entendu étaient à l'époque tirés par des locomotives à vapeur : des Atlantiques Nord ou des des Pacific. Une première révolution intervient en 1934 avec l'introduction de la traction diesel et des premières rames automotrices, les TAR (Trains Automoteurs Rapides) .

Deuxième grande révolution : l'électrification du parcours.

Oui, mais dès lors, les choses ont commencé à se compliquer. Pour électrifier leurs réseaux respectifs, la SNCB ayant opté pour le 3000 volts à courant continu, les Pays-Bas pour le 1500 volts à courant continu, et la SNCF pour la même tension dans la moitié sud du pays, mais le 25000 volts à courant alternatif dans l'est et le nord de la France. A Quévy qui, implantée sur le territoire Belge servait de gare frontière, un dispositif technique permettait de passer la caténaire d'une tension à l'autre sur des voies de service afin de l'adapter aux tensions exploitées par les différentes machines, et aux trains tractés par des locomotives équipées pour les deux types d'alimentation de franchir la gare sans s'y arrêter, ni même ralentir. En 1961, deux ans avant que l'électrification de la ligne ne soit achevée, la SNCF avait passé commande de ses deux premières locomotives tri-tension : les BB30001 et 2, et la SNCB de son côté, de 5 locomotives de la série 15, également tri-tension. Dès ce moment, les trains n'ayant plus systématiquement à s'arrêter pour changer de locomotives, le temps de trajet entre Paris et Bruxelles, fut ramené à 2h35.

Dès lors, tout était prêt pour le lancement d'un tout nouveau service, qui n'est autre que l'ancêtre du Thalys, les trains Trans Europe Express.

Le concept, des trains de voyageurs, de jour, européens, rapides, et de prestige, ne connaissant qu'une seule classe : la première. Leur lancement date du 2 juin 1957. Leur mission : contrer la concurrence du transport aérien qui commençait à se faire sentir, et faire préférer le train à une clientèle haut de gamme, constituée pour une bonne part de voyageurs d'affaires. La façon d'y parvenir, proposer des services inédits à bord d'un train : voiture restaurant, ou restauration à la place, mais aussi secrétariat, salon de coiffure ou boutique. A la fin de la seconde guerre mondiale, les grands trains express européens souffraient grandement de leur vieillissement. Les voitures Pullman dataient des années 20, les temps d'arrêt aux frontières étaient interminables, les TEE avaient pour vocation de redonner aux chemins de fer une image de modernité. Ce nouveau service fut porté par une co-entreprise regroupant les opérateurs Français, Néerlandais, Ouest-Allemand, Belge, Luxembourgeois, Suisse et Italien, plus tard rejoints par leurs homologues Autrichiens et Espagnols. L'idée était même d'aller beaucoup plus loin et de constituer à terme une seule compagnie disposant de son propre personnel, et d'un matériel unifié, ce qui ne sera pas le cas, chaque pays apportant finalement le sien.

A partir de 1963 par exemple, c'est l'introduction progressive des voitures Inox TEE PBA et des locomotives quadri-tensions de type CC40100.

Si l'histoire de ces machine vous intéresse, je vous renvoie à la vidéo que je leur ai consacrée. En résumé, la SNCF a fait construire 10 de ces locomotives, et la SNCB 6, dans la série 18. Toutes étaient conçues pour pouvoir également circuler en Allemagne, où la caténaire est alimentée en 15 000 volts courant alternatif, finalement les machines françaises ne rouleront jamais sur le territoire Allemand, ni aux Pays-Bas. Quand aux voitures Inox TEE PBA pour Paris-Bruxelles-Amsterdam, elles seront mises en service par la SNCF, et conçues sur le modèle des voitures DEV Inox, tout en veillant à sérieusement en relever le niveau de confort. D'abord, cette nouvelle commande ne concerne que des voitures de première classe. Toutes sont équipées de la climatisation et insonorisées. Chaque rame comprend un fourgon-générateur qui alimente les voitures en électricité. Vu de l'extérieur, elles se distinguent des voitures DEV Inox par leur bandeau rouge situé en haut de caisse, sur lequel figure en lettre d'or la mention Trans Europe Express. 11 de ces voitures seront aménagées en salon, 7 à compartiments, 7, comprendront une cuisine, 4 autres seront des voitures bar, enfin 7 fourgons-générateurs seront construits. L'ensemble de ces matériels a été retiré du service en 1996

Car à cette date, on change résolument d'époque, pour entrer dans l'ère de la grande vitesse.

Le déclin des grands express avait commencé bien avant. Dès 1979 plusieurs d'entre-eux sont devenus de simples inter-cités, renouant avec les trains mixtes première et deuxième classe. L'ouverture de la LGV Nord Europe ne laissera aucune chance aux derniers TEE encore en circulation. L'avenir est à la grande vitesse, désormais y compris pour les relations internationales.
La SNCF profite de la commande de rames réseau destinées à desservir la nouvelle LGV, pour lever une option pour la construction d'une série de 10 rames spécifiquement conçues pour circuler en Europe. Celles-ci seront tri-tensions, équipées du système de contrôle de vitesse ATB, déployé aux Pays-Bas, et pour bien se démarquer des autres engins en circulation, leur livrée sera rouge et gris. Leur aménagement intérieur très proche des autres rames destinées à la LGV Nord, à l'exception de la dominante rouge présente également à l'intérieur, sur les sièges et autres équipements. Les premiers ensembles mis en service portent les numéros 4331 à 4340. Ils sont surnommées PBA, pour Paris-Bruxelles-Amsterdam. Dès janvier 1995, elles remplaceront 3 des 4 TEE quotidiens assurant la liaison Paris-Bruxelles, et le temps de parcours tombera à 2 h et 14 minutes.

Mais à cette époque, le rebroussement en gare de Lille-Europe est toujours nécessaire.

Et oui, car la grande vitesse n'est praticable que côté Français. En Belgique, la LGV est toujours en construction, et les TGV PBA doivent rejoindre après Lille, la ligne classique pour gagner la capitale Belge via Tournai et Ath. Cette situation ne durera que quelques mois, avant l'ouverture d'un premier tronçon entre la frontière française et Antoing au mois de juin 1996. Le temps de parcours descend alors autour des 2 heures. Finalement, le 14 décembre 1997, la section Antoing-Bruxelles est ouverte au trafic. Le trajet se fait désormais quasiment de bout en bout à grande vitesse, à l'exception des parcours d'approche dans les deux capitales. Il ne faut plus qu'une heure 25 minutes pour les rejoindre. Le nombre d'aller-retour quotidien sur la ligne est alors fortement augmenté. Il y en a désormais 16, les trains classiques disparaissent purement et simplement des tables d'horaires. A l'occasion de cette ouverture, Thalys met en circulation 17 nouvelles rames quadri tension, les PBKA pour Paris-Bruxelles-Cologne-Amsterdam. Si les tronçons sont communs avec les rames PBA, les motrices sont de type Duplex. Leur poste de conduite est placé au centre de la cabine, et équipé de tout le nécessaire pour circuler sous les différents systèmes de sécurité et de signalisation et les différentes tensions exploitées dans les 4 pays concernés.

Le succès est très vite au rendez-vous, Thalys transportera plus de 3 millions de voyageurs en 1997 et dépassera les 5 millions deux ans plus tard, avant d'atteindre une apogée de 7 millions et demie de voyageurs transportés en 2019.

Entre Paris et Bruxelles, il existe alors 25 allers-retours quotidiens, et c'est la moitié du trafic assuré par Thalys qui passe par cet axe. Fort de son succès, l'entreprise ouvrira de nouvelles liaisons. Pour desservir les aéroports d'Amsterdam et de Roissy-Charles de Gaulle, et dans la foulée, Marne la vallée et finalement en 2019 pousser jusqu'à Bordeaux. Mais sans doute plus inattendu, à partir de l'hiver 1998/1999, ce sont des Thalys Neige qui sont mis en service vers Bourg-Saint-Maurice et l'année suivante des Thalys Soleil qui atteindront l'été Valence, puis Marseille à partir de 2002. Certaines de ces liaisons ne fonctionneront que le week-end ou pendant les vacances scolaire. Sera lancé également, le Thalys des députés européens, permettant à ceux-ci de faire la navette entre Bruxelles et Strasbourg. En Allemagne enfin, Thalys grignote encore quelques kilomètres pour dépasser Cologne et rejoindre au final Essen et Dortmundt.

En revanche, une autre expérience fera long feu, celle des Thalys Izy.

Contrairement aux TER ou aux Trains Inter-Cité, les TGV de Thalys ne faisant pas l'objet de subventions, ils avaient tendance à être perçus comme des trains chers, si l'on comparait le prix du billet au nombre de kilomètres parcourus. Pour faire face à cette critique, l'entreprise lança le service IZY pour relier Paris à Bruxelles à petits prix, mais en empruntant la ligne classique entre Paris et Arras, ce qui de facto rallongeait le temps de parcours d'une heure environ. Ce service a été interrompu après 6 ans, au début de l'été 2022.

La crise sanitaire qui n'a pas épargné Thalys, n'est sans doute pas totalement étrangère à cette disparition. L'entreprise a connu de très grosses difficultés financières dans cette période, et elle a du se ré-inventer.

Durant cette période particulière, seulement deux allers-retours quotidiens étaient assurés entre Paris et Bruxelles, et en 2020, Thalys a perdu 70% de son chiffre d'affaires. Depuis le retour à la normal, l'activité à repris, sans revenir pour autant au niveau de l'année 2019. Dans les ateliers, la rénovation des rames arrivées à mi-vie se poursuit. Elle doit concerner à terme les 17 rames PBKA. Débuté en 2016, sous la forme d'une rénovation légère, elle a fait place depuis 2021 à des opérations de transformation beaucoup plus lourdes, baptisées Ruby. Nouvelle livrée mais toujours rouge, nouveaux sièges, plus grande capacité, les toutes premières rames sont sorties rénovées des ateliers d'Hellemmes. Il est prévu que l'opération se poursuive jusqu'en 2024, mais pas sur que la marque Thalys existe encore d'ici là. Un projet datant d'avant la pandémie qui consisterait à voir Thalys rejoindre les rangs d'Eurostar, semble vouloir refaire surface. Depuis 2015, l'entreprise n'est plus simplement une filiale de la SNCF, mais un opérateur ferroviaire à part entière, disposant de sa propre licence d'exploitation, de son propre matériel et de son propre personnel. Un projet d'entreprise ferroviaire qui ne soit pas qu'une simple co-entreprise, comme elle avait été esquissée un temps pour coiffer les TEE verra peut-être le jour à cette occasion. Quoi qu'il en soit et même si cette fusion devait aboutir, il est acquis que les TGV PBKA conserveront leur livrée rouge, et ne s'aventureront pas dans le tunnel sous la manche puisqu'ils ne sont pas équipés pour rouler au Royaume-Uni, quand aux TGV Eurostars, ils conserveront leur livrée bleue, mais eux pourraient bien étendre leurs relations vers l'Allemagne par exemple.

Il me reste vous demander si vous avez déjà voyagé sur ces lignes, à l'ère du TGV ou à l'époque des Trains Trans Europe Express, si vous conduisez ou avez conduit les uns ou les autres, ou travaillé à bord. Comme à chaque fois vous pouvez me raconter vos expériences et vos souvenirs en commentaires, que je lirais comme toujours avec beaucoup d'intérêt avant de vous retrouver pour un prochain épisode d'Aiguillages.

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