Le Train Jaune
Villefranche-de-conflent
Le Train Jaune Villefranche-de-conflent
Transcription :
Villefranche de Conflent est une petite cité médiévale du département des Pyrénées Orientales, et le petit air frais qui nous surprend au levé alors que nous sommes en plein mois d'août, et malgré un soleil déjà bien présent, est là pour nous rappeler le caractère montagneux de la région que nous allons traverser. Fort heureusement, car nous comptons bien nous installer pour le voyage aller au moins, dans l'une des voitures panoramiques du Train Jaune, les températures vont bien vite remonter. Et c'est bientôt l'heure du départ.
Nous embarquons à bord du premier train de la journée, pourtant les passagers sont déjà très nombreux. En pleine période estivale, le Train jaune fait recette et joue souvent à guichets fermés. Officiellement nous sommes sur la ligne Perpignan-Latour de Carole, même s'il existe en gare de Villefranche de Conflent une rupture évidente. Les passagers en provenance de la préfecture des Pyrénées Orientales et à destination de Latour de Carole ou d'au-delà, réalisent ce trajet en deux parties. La première à bord d'un TER classique, la suite à bord du train jaune qui circule sur une voie métrique. Les premiers kilomètres du parcours sillonnent un fond de vallée. Les choses sérieuses ne tardent toutefois pas à commencer. Car le long de ses 63 km de ligne, notre train aura à s'élever de 427 à 1593 mètres d'altitude soit un dénivelé de plus de 1000 mètres avant de redescendre à 1232 mètres à son terminus.
En traversant ces paysages, on imagine aisément combien les habitants des hauts plateaux Catalans pouvaient être isolés du reste du monde, en particulier durant l'hiver. Et c'est précisément pour désenclaver cette région que des travaux pharaoniques furent envisagés à la fin du XIXème siècle. La ligne de celui que les habitants de la région allaient plus tard affectueusement rebaptiser le Train Jaune, fut déclarée d'utilité publique en 1903. Les premiers coups de pioche furent donnés dans la foulée. Un premier tronçon pu être ouvert à la circulation jusqu'à Mont-Louis, dès 1910. L'année suivante, il était prolongé jusqu'à Bourg-Madame, mais ce n'est qu'en 1927 qu'il fut possible de rejoindre en train Latour de Carole. 390 courbes, 650 ouvrages d'art dont 19 tunnels et deux ponts remarquables furent nécessaires pour se frayer un chemin dans la montagne. Mais ce n'est pas tout. Pour se mouvoir, notre train avait besoin d'énergie, et c'est un complexe constitué d'un barrage et de 9 usines qui a été construit pour alimenter la ligne.
Ce site produit aujourd'hui beaucoup plus de Kilowatts que le train jaune n'en consomme, aussi, le surplus est revendu à EDF pour être réinjecté dans son réseau, et qui sait peut-être venir alimenter en électricité l'écran sur lequel vous regardez ce reportage. Notre train qui peut atteindre des pointes de 55 km/h en fond de vallée est maintenant en plein effort et peine à dépasser la vitesse de 30 km/h. Le voyage dure un peu moins de 3 heures, ce qui n'a guère évolué depuis l'inauguration de la ligne au début du XXème siècle. Mais on mesure les progrès accomplis quand on sait qu'avant le train, le seul moyen d'atteindre ces hauts plateaux était de faire le voyage en diligence. Un trajet qui prenait alors pas loin de 2 jours.
Après avoir franchi les ponts Séjourné et Gisclard qui permettent à deux reprises à la ligne de passer d'un flanc de vallée à l'autre, notre train arrive en gare de Mont-Louis/la Cabanasse, ou nous croiseront un autre convoi en provenance de Latour de Carole. Nous sommes déjà à 1512 mètres d'altitude, mais nous allons monter encore un peu, pour nous retrouver à la gare de Bolquère-Eyne, à 1592 mètres d'altitude. Difficile d'aller plus haut en train, il s'agit là de la plus haute gare située sur le réseau de la SNCF, et il faut aller dans les Alpes, emprunter le Tramway du Mont-Blanc pour dépasser cette altitude sur rail, et atteindre 2372 mètres au terminus du Nid d'Aigle.
A partir de ce point, notre train va redescendre légèrement continuant à sillonner les Hauts Plateaux Catalans jusqu'à son terminus de Latour de Carol. C'est là une gare qui mérite que l'on s'y arrête, car elle a le rare privilège de pouvoir recevoir des trains sur des voies à trois écartements différents. Celui métrique des voies du train jaune, l'écartement standard de 1 mètres 435 pour celles de la SNCF, et celui de 1 mètres 668 pratiqué par les chemins de fer Espagnoles de la Renfe. La frontière étant toute proche, des trains en provenance d'Espagne pénètrent en effet sur le territoire Français en conservant ici leur écartement spécifique. A ces trois écartements correspondent également 3 tensions d'alimentation : 750 volts pour le train jaune, 1500 pour les autres voies de la SNCF, et 3000 pour les trains en provenance de la péninsule Ibérique.
Le train jaune compte de nombreux partisans, qui ne font pas que le soutenir par des mots, mais l'empruntent également. C'est le cas par exemple de la Team Train Jaune, trois familles qui ont pris l'habitude de prendre leurs vacances ensemble dans la région et partent randonner en montant à bord du train. Nous ferons une partie du voyage retour en leur compagnie.
De retour à Villefranche de Conflent, c'est un autre soutien du train jaune qui nous attend. Paul Dumanois, le président de l'association Développement Patrimoine et Constructions ferroviaires. Mais c'est cette fois-ci en 4*4 que nous allons prendre de l'altitude. Direction Fort Libéria, un ancien ouvrage militaire qui domine la petite ville et la gare du train jaune d'un peu plus de 200 mètres. Paul a installé là-haut dans ce qui constitue une petite partie de la collection du musée de l'association, quelques pièces ayant appartenues à la Compagnie des Chemins de Fer du Midi et pour certaines, au Train Jaune. Une ligne qui est encensée par beaucoup, et menacée par d'autres. Bien des enjeux sont engagés actuellement autour du matériel roulant qui date des débuts de l'exploitation en 1909. Ce matériel pourrait continuer de circuler jusqu'en 2020, mais au-delà, il faudrait envisager soit de le remplacer complètement, soit de le rénover à l'identique en transférant les caisses actuelles sur de nouveaux châssis. Une solution qui a la préférence de tous les amoureux du Train Jaune, mais il reste à la toute nouvelle région Occitanie et à la SNCF à se mettre d'accord dans le cadre de négociations qui se sont engagées autour de la signature de la nouvelle convention TER sur l'avenir du Train Jaune.
On se trouve dans un site qui est quand même privilégié, parce que c’est un site classé à l’UNESCO, c’est le Fort Libéria de Villefranche qui par rapport au Train Jaune est un peu le lien patrimoine de la ligne parce qu’il y a Mont-Louis également, ce sont les deux sites classés UNESCO sur la région et c’est pour ça qu’on a décidé, par rapport à la défense du Train Jaune, d’utiliser ce site pour parler du Train Jaune qui est entre guillemets voué aussi à être classé à l’UNESCO s’il y a les moyens. L’idée, c’est de faire un musée ferroviaire dans le sud-ouest, plutôt sur les chemins de fer du midi et sur l’histoire de toute la Compagnie du Midi, l’histoire du chemin de fer dans la région sud-ouest, la grande région qui a été baptisée « sud-ouest » après que la Compagnie du Midi a été montée.
Vous l'avez-vu encore une fois dans ce reportage, les Chemins de fer du Midi et le Train Jaune sont à l'origine de bien des passions, d'inquiétudes aussi quant à la pérennité de la ligne du Canari et à la préservation de son matériel historique. Il y aurait tant à dire à propos de cette ligne, qu'il faudra sans doute lui consacrer un autre sujet dans quelques temps pour vous faire part de son actualité.
La semaine prochaine dans Aiguillages nous nous rendrons en Bretagne, dans le Morbihan, pour une visite au Séné Rail Miniature, un club de modélisme ferroviaire très actif dans la région et même au-delà.
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