Des nouvelles de la 241P9

(AAATV Midi-Pyrénées)

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Des nouvelles de la 241P9 (AAATV Midi-Pyrénées)

Transcription :

Bonjour et bienvenu dans Aiguillages, aujourd'hui, je prends le train pour me rendre à Toulouse et vous ramener des nouvelles d'une locomotive qui est en cours de restauration, c'est une grosse machine, puisqu'il s'agit d'une 241P. C'est l'association 3ATV de Toulouse qui a en charge sa remise en état, un chantier de longue halène qui a commencé il y a plus de 10 ans, qui devrait se poursuivre quelques années années encore, mais là, il y a urgence à remettre la locomotive sur ses roues car elle va devoir quitter prochainement l'atelier dans lequel elle est remisée.

Les séances de travail ayant lieu tous les samedis, c'est en fin de semaine que j'arrive en train à Toulouse, pas besoin d'aller bien loin, le chantier de la 241P9 est installé dans l'ancien techni-centre de la gare de Toulouse Matabiau.

Pour voir à quoi cette locomotive ressemble, on va faire un détour par chez Paul Laroque, un modéliste qui l'a reproduit au 1/20ème, car le modèle à l'échelle 1 est à l'heure actuelle en pièces détachées, et en cours de remontage. L'histoire de cette locomotive remonte à la fin de la 2nde guerre mondiale, elle a été construite par les établissements Schneider au Creusot en 1947, elle s'inscrit dans une série de 35 machines produites entre 1946 et 1952, et mises en service dans les régions Sud-Est et Nord. Ce seront les dernières locomotives à vapeur de série, construites en France pour la SNCF. Des engins conçus si ce n'est pour rivaliser avec les motrices électriques les plus puissantes de l'époque, du moins parvenir à les égaler, afin d'assurer leur service en respectant les mêmes temps de parcours, ou les relayer efficacement, sur les sections de ligne encore non électrifiées. Leur puissance est de 4000 chevaux, et leur vitesse de croisière 120 kmh/h. On doit leur conception au célèbre ingénieur André Chapelon, qui les a créée sur la base des 241 C du PLM. 241 signifie qu'elles sont constituées de deux essieux porteurs à l'avant et un à l'arrière, mais surtout de 4 essieux moteurs, dotés chacun de 2 roues de 2 mètres de haut. On appelle pour cette raison ces machines, les grandes roues. Ce gros bloc fixe constitue un ensemble de 8 mètres de long qui réserve ces locomotives exclusivement aux grandes lignes, dont le rayon de courbure est généreux. La 241P9 affectée au dépôt de Dijon Perrigny en juin 1949, se retrouvera ainsi très souvent en tête du Mistral ou du Train Bleu, jusqu'à ce que l'électrification complète de la ligne PLM, en fasse une persona non grata sur la liaison Paris-Lyon-Marseille. Elle sera alors mutée au dépôt du Mans, à partir duquel, elle assurera des trains lourds vers la Bretagne. Son dernier train commercial, elle le fera entre Nantes et Le Mans, le 22 septembre 1969. Après 1 million 600 000 km parcourues, elle sera garée bon état, c'est à dire qu'elle pourrait éventuellement être remise en service, mais que sans affectation particulière, à terme, elle sera découpée au chalumeau. Pour lui éviter ce destin funeste, Raymond Dauphin, chef traction de Bordeaux, crée l'Amicale des Anciens et Amis de la Traction Vapeur SNCF, la 3ATV, et s'enquièrent de lui trouver un lieu de stationnement abrité. Il le trouve à Guîtres, sur le site de la gare qu'occupe l'Association du Train Touristique de la Vallée de l'Isle. Le 16 septembre 1974, le transfert est réalisé. La locomotive est sauvée, mais elle va rentrer dans un très long sommeil. Son prochain voyage, elle ne le fera que 35 ans plus tard. Un groupe d'une 20aine de passionnés, de la section 3ATV Midi-Pyrénées lui rend visite sur place, et se persuade de la possibilité de lui redonner vie. Après 2 ans de préparation, deux grues soulèvent les 220 tonnes de la machine pour l'a poser sur un camion, qui l'emmènera quelques kilomètres plus loin, ou elle pourra retrouver des rails embranchées au réseau ferré national. Elle pourra ainsi rejoindre, en étant remorquée Bordeaux, puis Toulouse à la vitesse maximale de 30 km/. Depuis 2009, la 241P9 est hébergée ici. Dans un premier temps, une voie lui avait été réservée dans les locaux du technicentre de Toulouse Matabiau, ou elle cohabitait avec les locomotives électriques du type 7200 et les autorails diesels que celui-ci avait la charge de maintenir. Depuis 2 ans, ce bâtiment a été déserté par la SNCF et la section midi-pyrénées de la 3ATV a pu prendre ses aises. Mais cette situation plutôt privilégiée pour une association de sauvegarde du patrimoine ferroviaire, risque de ne pas durer, car dans le cadre de la requalification du quartier, et du projet Toulouse Euro Sud Ouest qui prépare l'arrivée d'une ligne à grande vitesse et la création par la même occasion d'un pôle multi-modal, le bâtiment qui abrite l'association est amené à être démoli.

Sans parler de course contre la montre, les compagnons de la 3ATV doivent faire en sorte que la locomotive soit remise sur ses roues pour quitter les lieux comme elle y est venue, en remorque d'ici 2023. Ce délai doit être également mis à profit pour trouver un nouveau point de chute, si possible dans la région. On parle de Béziers ou de Nîmes, sans que pour l'instant rien ne soit décidé dans ce domaine. A ce jour, 32000 heures de travail bénévole ont été estimé avoir été consacré au démontage complet de la machine, à la révision de l'ensemble des pièces qui l'a constitue, et son remontage est largement entamé. Ce chantier a été réalisé en différentes grandes étapes.

On a eu le train de roues, qui grosso modo a mis 5 ans entre la réparation, des problèmes administratifs, la réfection des bandages, la réfection du profil de roue qui a du être fait, donc ça a mis à peu près 5 ans et ça a été un des plus gros postes de dépenses aussi. On a restauré le tender, qui a été remis sur ses roues, puisque les roues ont également été révisées, les bogies remis sur les roues, et le tender sur ses bogies en complet, il est pratiquement terminé, il ne reste presque plus qu'à le le repeindre. On continue l'atelier roues puisqu'il faut maintenant finir de réguler et mettre en état les boîtes d'essieux, et l'étape suivante sera la remise sur roues de la machine.

Une opération délicate qui pourrait être réalisée dès la fin de l'année 2020, ou sur les premiers mois de 2021, avant que la suite du chantier ne puisse se dérouler. Il concernera notamment la chaudière.

La chaudière est en relativement bon état, par contre il y a toute la tubulure à changer forcément, une petite réparation à faire sur une des plaques tubulaires, donc avec l'Apave, il y a un chiffrage global de ce chantier là qui doit être pris en charge par une seule entité, donc ça va être le dernier gros poste coûteux de la machine.

5 ans à prévoir sans doute encore avant la première remise en chauffe de la machine, le temps qu'il faut pour réaliser le travail au rythme d'une 15aine de compagnons présents à Toulouse chaque samedi, mais aussi le temps de faire rentrer l'argent nécessaire pour la rémunération des intervenants externes lorsque les travaux ne peuvent pas être pris en charge par l'équipe. Même si plusieurs entreprises locales aident l'association en lui fournissant gracieusement le matériel qui lui est utile ou des financements complémentaires. Sans compter les savoirs faire perdus. Ainsi les essieux des machines à vapeur françaises doivent être envoyés en Allemagne. Mais la refabrication de certaines autres pièces n'est pas non plus sans poser de problème. Les trappes à eau du tender, ont par exemple du être refabriquées en raison de leur trop mauvais état. C'est un lycée professionnel de Decazeville en Aveyron qui a un département dédié aux métiers de la chaudronnerie qui s'y est attaqué. Un chantier pas si évident à réaliser, car les outils d'aujourd'hui ne sont plus adaptés à la production de ce type de pièces. Les élèves de ce lycée avec lequel l'association a noué un partenariat, vont maintenant s'attaquer à la re-fabrication des pare-fumée de la locomotive. Il y a bien des chances qu'ils ne soient pas confronté deux fois dans leur vie professionnelle, à une telle production.

Même si la perspective de voir la machine rouler par ses propres moyens sur le réseau ferré national est encore un peu lointaine, elle se rapproche néanmoins à grand pas, et les compagnons de la section Midi-Pyrénées de la 3ATV sont dores et déjà d'accord sur la destination de son voyage inaugural. La 241P9 devrait retourner sur ses propres pas à Bordeaux et au Mans, là ou l'histoire de sa nouvelle vie a commencé. En 2025, si tout va bien. Bon, comme c'est pas pour tout de suite, je vous retrouve quand à moi dès la semaine prochaine, pour de nouvelles aventures sur les rails.




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