Le Musée Lorrain des Cheminots

Plein écran cliquez ici

(ou appuyez sur la touche Entrée de votre clavier)

Le Musée Lorrain des Cheminots

Transcription :

Nous nous rendons à Rettel aujourd'hui, pour vous faire découvrir le Musée Lorrain des Cheminots, qui dans les tous prochains jours va proposer une exposition sur l'histoire de la ligne de Thionville à Apach qui traverse le village et à propos de laquelle l'association qui gère le musée vient de publier un livre à l'occasion de ses 140 ans. Bonjour et bienvenue dans Aiguillages !

Rettel c'est un petit village de Moselle dans la région de la Lorraine, tout proche de Thionville, de l'Allemagne, ou encore de Shengen dans le Grand Duché du Luxembourg, connu pour les accords qui y ont été signés en 1985.

Après un déjeuner bien agréable au bord de l'eau, Rettel est baigné par celles de la Moselle, nous nous rendons dans le centre du village qui abrite ce musée créé par Laurent Courtade. Fils et petit-fils de cheminot, ce passionné du rail a grandi dans une maison de garde barrière, située sur la commune. Il est lui-même employé de la SNCF où il a passé 14 ans au service de la voie, avant de changer pour celui de l'exploitation. A Rettel plus de 70% de la population travaillait au chemin de fer. Le dépôt de Thionville et les 150 machines qu'il abritait en 1910 étant tout proches.
La commune ne possède pourtant ni gare, ni halte. Les trains se contentent de la traverser. Collectionneur d'objets ferroviaires depuis toujours, Laurent a créé une association dans la perspective d'ouvrir un jour ce musée. C'était il y a 20 ans. Faute de local, les premières expositions furent présentées en plein air, avant que le maire de l'époque, lui-même fils de cheminot, ne propose celui dans lequel la collection est abritée aujourd'hui. C'est une bâtisse historique dont on retrouve la trace sur des plans datant du 18ème siècle, mais qui est probablement beaucoup plus ancienne, et à de fortes chances d'avoir été construite entre le 15ème et le 16 ème siècle, tout comme les autres maisons du quartier dans laquelle elle se trouve. L'espace est constitué de différentes pièces, chacune étant dédiée à un thème. L'accent est mis sur les métiers peu connus ou peu visibles du grand public. Ceux liés à la voie, au service électrique, à la téléphonie, ou aux postes d'aiguillage. La visite se termine sur une évocation de ceux de la traction vapeur ou électrique, ainsi que sur celle de la place des apprentis du rail, certains rejoignant les écoles de la SNCF ou des compagnies qui l'ont précédé dès l'âge de 14 ans. Le travail des femmes est également abordé, parce-que que souvent oublié. Le musée rappelle le rôle qu'elles ont joué notamment lors des deux conflits mondiaux où elles ont été amenées à remplacer les hommes partis au front. Le musée met également l'accent sur les spécificités de la région où il se trouve. Ici, les trains roulent à droite, ce qui est un héritage datant de sa première annexion par l'Allemagne de 1871 à 1918, et les lignes électrifiées le sont en 25000 volts/50 hertz. Laurent Courtade est ravi de constater que même si le musée qu'il a créé vit avec des moyens très limités, il recèle bien des trésors qui poussent le visiteur à y passer beaucoup plus de temps qu'il ne l'aurait imaginé.

Vu de l'extérieur, c'est vrai que notre musée ne paye pas de mine, on se dit « c'est tout petit, on va faire le tour en 10 minutes et c'est déjà bien » et en fin de compte lorsqu'on commence à y rentrer, c'est une heure et quart, une heure et demie, peut-être même deux heures après qu'on en ressort. Depuis que nous existons, on n'a jamais eu des gros budgets, on a toujours fonctionné avec des très petits budgets, à valeur d'euros on tourne avec 1000 ou 1500€ par an et on a toujours su se développer et toujours présenter, tous les ans, des nouveautés.

Les nouveautés pour 2018 ce seront l'organisation d'une exposition et l'édition d'un livre, mais aussi la présentation d'un autre métier méconnu, celui de géomètre.

La visite commence par une présentation des métiers du service de la voie qui se fait autour de la présentation d'un morceau de voie typique de l'alsace lorraine, tel qu'il a été hérité des allemands, et d'un tableau retraçant les différents systèmes d'attache de la voie à la traverse. Des crampons utilisés à l'origine, en passant par les différents types de tire-fond employés au fil du temps et de la traverse en chêne, en passant par celle en sapin, pour arriver aux traverses en béton qui utilisent un système d'accroche qui se passe de tire-fond. En complément, la présentation d'un ancien appareil de contrôle de la voie, mis au point par l'ingénieur Hallade pour le compte des Chemins de fer de l'Est est une occasion de parler de l'évolution de ces métiers jusqu'aux actuels système Mauzin et aux technologies utilisées pour vérifier la voie du TGV.

On voit bien que le marteau rebondit bien, là il a plus de mal.

Vous pourrez même voir dans cette pièce des rails abimées ou cassées, et Laurent Courtade s'il vous fait la visite, vous montrera comment les défauts constatés sur la voie sont contrôlés et corrigés, et vous aurez peut-être la surprise d'apprendre que des thermomètres sont placés dans les voies pour en mesurer la température. Il est ainsi possible de déterminer s'il est possible d'intervenir dessus sans risque dans les périodes où la chaleur augmentent fortement. Dans la région, ce type d'intervention est interdit entre le 15 mai et le 15 septembre pour éviter toute déformation de la voie qui pourrait conduire à des restrictions ou même interdiction de circulation.

Autre activité présentée : la lampisterie et son établi. On y découvre que la DB a continué à utiliser des lampes à pétrole jusque dans les années 90, où elles continuaient à être mise en place en gare d'Apach. Au sol, est présenté l'évolution des lanternes de signalisation arrière des trains, qui permettent de s'assurer dans les gares et les postes d'aiguillage que les trains sont complets.

Première génération de lampes électriques en 1962, le surnom que les cheminots avaient donné à ce type de lampe, c'était « marmite ». A partir de 1981, les premières générations des lanternes jaunes avec un progrès technique : une cellule captage du taux de luminosité pour l'allumage et l'extinction automatique des lampes, ce qui fait que les piles durent beaucoup plus longtemps et on peut les poser en permanence, par contre elles sont très lourdes. Après, deuxième génération des lanternes jaunes, 1990 : allègement du poids de la pile, on a supprimé le métal pour la carcasse de la lampe on a utilisé du plastique, par contre le procédé est toujours le même, une cellule de captage du taux de luminosité. Et depuis 2001, là encore amélioration technique, on a pu réduire encore une fois le poids de la pile et de l'ensemble et on n'utilise plus des ampoules mais des LEDs.

Pour se déplacer dans les installations ferroviaires, les cheminots disposent également de lanternes pour voir, mais surtout être vue. Les premières n'éclairaient ainsi pas grand-chose, elles étaient à l'huile de Colza. Celles à carbure éclairaient déjà beaucoup mieux, mais fonctionnant sur la base d'une réaction du carbure mis en contact avec de l'eau, elles présentaient l'inconvénient de ne plus fonctionner dans le froid, l'eau gelant.

Laurent nous emmène maintenant dans la pièce consacrée au service électrique. Le chemin de fer a toujours possédé son propre réseau de téléphonie. C'est une loi de juillet 1845 qui lui impose. Aucune ligne ne peut-être ouverte tant que son système de téléphonie n'est pas mis en œuvre. Bien sur le télégraphe à céder la place au téléphone de campagne, fonctionnant grâce à un système de perches, et de fils torsadés présentant un symbole pour reconnaître la ligne. Le téléphone de campagne a été utilisé par la SNCF jusqu'en 1997, date à laquelle il a été remplacé par les téléphones portables actuels.
Dans la même pièce, Laurent vous expliquera le principe de la protection des circulations par le Bloc Automatique Lumineux et que si les couleurs sont disposées différemment que sur les feux tricolores destinées aux automobiles, c'est un héritage des sémaphores.

Dans la pièce voisine, vous découvrirez précisément comment ces signaux et les itinéraires auxquels ils étaient associés étaient commandés à distance, à l'aide de systèmes propres à ceux mis en œuvre en Alsace/Lorraine, ou par les Chemins de Fer de l'Est.

Ici la version Alsace/Lorraine, ce sont des jeux de blocks électromécaniques Siemens et Halske, ils ont inventé ça en 1872, alors le principe : lorsqu'ils annonçaient un train à la gare suivante, il fallait en plus de l'annonce verbale, ils descendent le levier correspondant et il tourne la manivelle, le blanc va passer au rouge, qui après fait bloquer le levier et du côté où le train va arriver, le blanc passe au rouge, il libère le levier et il va libérer aussi l'enclenchement de parcours et les assentiments. Donc je fais l'essai … Normalement, c'était 7 tours, une fois que ça a tourné et que c'est passé au rouge, ça s'arrête et il relâche, et on relève, c'est bloqué, ce qui fait que si un autre train arrive, lui devra attendre que celui qui a été expédié soit arrivé. Et une fois qu'il arrive au poste ou à la gare suivante, il vérifie que le train est complet, avec la présence soit des plaques de queue ou des lanternes, et si le train continue on peut remettre l'enclenchement a été libéré, il peut y avoir aussi par serrure une connexion, c'est-à-dire que je ne peux pas aller par-là, il y a peut-être des trains en haut, ou alors il y a une desserte d'une usine, donc il faut qu'il reste comme ça, qu'il fasse l'annonce à la gare suivante et l'idéal c'est qu'il n'oublie pas de rendre la voie libre en premier, si jamais il oublie, le premier n'aura pas l'annonce. Et là c'est vrai que je n'ai pas rendu la voie libre. L'ensemble est bloqué, il peut relancer son train. Par contre, il ne peut pas faire un rappel.

Les Chemins de Fer de l'Est ont quant à eux opté pour le système Lartigues.

A l'étage, les membres du Musée Lorrain des cheminots ont installé le réseau légué par la famille d'un modéliste décédé et reconstitué un guichet de gare à partir d'éléments récupérés à celle de Sierck les bains situés juste à côté. Et la dernière partie de la visite nous rapproche des métiers de la conduite. Ceux de chauffeur, ou de mécanicien, à bord des locomotives à vapeur, et plus tard des locomotives électriques, telles les CC14000, emblématiques de la région, et qui avaient été surnommées les "Fer à repasser". Et pour finir, les visiteurs pourront s'essayer à la conduite, sur un simulateur construit sur la base du pupitre d'une 16500, installé par Auguste Cuisance dont je vous ai parlé dans un précédent numéro d'Aiguillages.


Si vous souhaitez le visiter, sachez que le musée est ouvert tous les deuxièmes dimanches du mois, en plus du 1er mai, des journées du patrimoine et du jour de la fête patronale du village, qui tombe en principe, le 1er dimanche d'août, mais il est possible également de prendre rendez-vous pour le visiter à d'autres dates. Cette année, il sera également ouvert pour une exposition exceptionnelle les 5 et 6 mai, à l'occasion du lancement du livre Thionville-Apach, 1878-2018, 140 ans de chemin de fer, édité par l'association. Plus d'information sur le site museelorraindescheminots.fr.

La semaine prochaine dans Aiguillages, le Petit Train Castelneuvois, il s'agit d'une association exploitant un circuit de train de jardin en 5 et 7 pouces ¼.

Suggestions de reportages à revoir dans la catégorie : Patrimoine