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Le Velay Express

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Le Velay Express

Transcription :

Tence, c'est le dépôt principal du Velay Express, nous sommes en région Auvergne-Rhône-Alpes et la ligne que nous allons emprunter n'a pas attendu la réforme administrative pour relier les deux entités. Cette portion de voie de l'ancien réseau de la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux a pour origine la gare de Raucoules en Haute-Loire un département Auvergnat et pour terminus la commune de Saint-Agrève qui se trouve quant à elle sur le territoire de feu la région Rhône-Alpes, pour 3 petits kilomètres parcourus dans le département de l'Ardèche. La desserte de Raucoules est assurée par un autorail ou un court train diesel tractant une ou deux voitures, l'essentiel du trajet se faisant ensuite les dimanches en train à vapeur au départ de Tence, lieu où sont remisés les engins de traction de l'association. Aujourd'hui, c'est la locomotive la plus emblématique de ce réseau qui va assurer le service. Une Blanc-Misseron. La numéro 101. Une machine Mallet typique des chemins de fer de Montagne. C'est d'ailleurs en Suisse que le système Mallet du nom de son inventeur, a été mis au point, pour que les compagnies de chemins de fer puissent disposer de machines puissantes et capables de se glisser sur des lignes parfois très sinueuses. Le brevet est déposé en 1884. De nombreuses machines seront conçues sur les bases du système Mallet. A voie normale, surtout aux Etats-Unis ou de très grosses machines seront construites sur ce principe. En Europe, le système Mallet a surtout été adapté à des machines à voie étroite dont beaucoup ont circulées dans la région ou nous nous trouvons. On peut encore en voir en service sur le réseau du train de l'Ardèche, dont les voies sont situées dans le prolongement de celles du réseau sur lequel nous nous trouvons. Mais aujourd'hui, c'est la locomotive Mallet N°101 du Velay Express que nous allons voir évoluer. Cette locomotive a été construite en 1906 dans des ateliers situés à Blanc et Misseron, une commune du Nord de la France non loin de Valenciennes et de la frontière Belge, un détail qui a toute son importance. Car de conception Belge, ces machines arrivaient en pièces détachées en France, ou elles étaient assemblées. Cela permettait ainsi d'échapper à certaines taxes à l'importation. Comme quoi, on finirait presque par croire que notre époque n'a rien inventé. Sa carrière, cette machine l'a réalisée sur le réseau du PO Corrèze, l'un des réseaux à voie métrique de la Compagnie du Paris-Orléans. Elle a pris sa retraite avec la fermeture de la ligne en 1970. Elle circulera alors quelques années encore sur les voies de l'ancêtre du Velay-Express, avant de devoir être arrêtée en raison de la dégradation de son état général. Après une restauration réalisée dans les ateliers du Train à Vapeur des Cévennes, elle a pu reprendre le service en 2012.

Notre train serpente dans de très beaux paysages. Dès la sortie de Tence, il s'engage dans une grande section en forme de fer à cheval qui l'amènera quelques minutes après son départ à repasser devant sa commune d'origine, dans le sens inverse de celui qu'il avait emprunté à la sortie de la gare, mais à quelques kilomètres de distance, et en ayant pris déjà un peu d'altitude.

La première gare rencontrée sera celle du Chambon sur Lignon. Nous rentrons ici en territoire Cévenol. La commune est connue pour avoir protégé des citoyens juifs, qui ont pu ainsi échapper à leur déportation en camp de concentration durant la seconde guerre mondiale.

Pour notre locomotive, après l'effort, c'est le temps d'un premier réconfort. Une prise de complément en eau, qui va être réalisé au bénéfice de cette halte, pour le plus grand plaisir des voyageurs qui vont pour de ce fait assister à différentes manœuvres. Pour se rapprocher de la borne à incendie qui fera office de grue à eau, il faut en effet décrocher la Mallet de son convoi et l'orienter sur une autre voie de la gare. Une opération qui fera les délices de ce passager du train.

Profitons de l'arrêt de notre convoi, pour faire connaissance avec l'un des membres de l'équipe de conduite. Nicolas a connu très jeune celui qui ne s'appelait pas encore alors le Velay Express.

Je suis arrivé en 1984 sur ce réseau, j’avais de la famille à Dunières, ma tante et ma grand-mère maternelle, qui habitait juste en face de la gare Dunières-ville. Je voyais le train, et quand j’ai commencé à m’y intéresser, on est allés faire un tour avec ma grand-mère, j’ai pris contact et j’ai fait deux saisons ici, en 1985 et en 1986, puis la ligne a fermé donc j’ai cherché d’autres chemins de fer touristiques. En 1987-1988 j’ai découvert beaucoup de chemins de fer à vapeur en voie normale, en voie métrique, en voie de 60, et j’ai atterri en Baie de Somme. En 1989, je passe mes premières armes, et en 1990 je passe mécanicien, et depuis je suis mécanicien sur le chemin de fer de la Baie de Somme, et j’y vais très régulièrement, 8 fois par an, surtout pour être mécanicien, chauffeur en Baie de Somme.

Et puis l'exploitation du train touristique entre Dunières et Saint-Agrève a repris, et Nicolas, est tout naturellement revenu.

Ici, je suis arrivé en 2011, surtout pour donner un coup de main sur la voie, c’était un petit plus. Avec la nouvelle exploitation, il y avait besoin de mécaniciens, et on m’a demandé de monter en grade, d’être chauffeur d’abord et là je suis apprenti mécanicien cette année.

Malgré sa grande expérience de la chauffe et de la conduite de locomotives au Chemin de Fer de la Baie de Somme, ici Nicolas a refait un parcours de formation complet, se consacrant dans un premier temps uniquement à la chauffe, avant de se lancer cette saison dans la conduite.

Les machines c’est un peu la même chose, c’est toujours une machine à vapeur, par contre il y a besoin de connaître le frein à vide d’une part, et d’autre part il faut connaître la ligne. Ligne qui est quand même assez difficile, puisqu’elle est en dents de scie : ça monte, ça descend, ça monte, ça descend tout le temps. Et quand ça monte, ça monte bien : 30/1000 maximum, c’est énorme pour un chemin de fer, et même 32,5 de l’autre côté. On apprend toujours sur le tas sur un chemin de fer touristique, c’est vraiment quelque chose qu’on apprend petit à petit, puisque moi, je n’ai aucune formation mécanique, donc je viens avec mes deux mains et il faut apprendre des choses, ça m’arrive aussi de faire du travail de métal, de faire quelques petits trucs, mais vraiment pas grand-chose. En technique vapeur, ce qui m’intéresse en fait c’est d’abord la technologie de la machine à vapeur, et l’aspect conservation du patrimoine ferroviaire.

L'apprentissage c'est aussi celui de la machine, chacune ayant potentiellement ses petits caprices.

Cette locomotive en particulier a tendance au patinage, surtout à basse vitesse, et c’est un peu plus compliqué parce que la voie étant ce qu’elle est, il faut aller doucement, c’est nécessaire de faire attention à l’état de la voie, prudemment. C’est toujours la même chose, avec une machine qui et sur des rampes importantes, il y a aussi une technique à apprendre, qui n’est pas forcément la même qu’en Baie de Somme, en Baie de Somme, on a des rames très longues : on a 8-9, voitures, par contre on a aussi plus de vitesses, il faut assurer de correspondances, donc ce n’est pas du tout la même chose.

D'autant plus qu'en Baie de Somme le profil de la ligne n'a rien à voir avec ce qu'il est ici en moyenne montagne, même s'il existe quand même une rampe qui demande un peu de dextérité aux mécanos.

Une rampe de la moitié, de 18/1000, donc c’est rien du tout par rapport à ici, il y a une rampe et on dit toujours « la rampe », c’est la seule du réseau. Partir de Saint-Valery à 0 et se lancer dans la rampe, c’est assez difficile, surtout quand on a un train qui est chargé.

En Baie de Somme ou dans le Velay, la journée d'une équipe de conduite commence forcément très tôt, il faut en moyenne 4 heures pour préparer une machine.

La journée commence trop tôt, je me suis levé à 5h du matin, et on était sur le pied de guerre à 6h, on avait déjà préparé la machine la veille, hier on a nettoyé la machine, on l’a mise un peu en pression pour qu’elle soit chaude et qu’on ne soit pas obligés de partir à 20°C le lendemain matin, ça va plus vite. Il est nécessaire de faire cette chauffe prudemment, lentement, pour que tout se dilate bien et qu’il n’y ait pas de coups de chaud dans la chaudière. Justement, une autre différence avec les locomotives de la Baie de Somme : souvent les locomotives de la Baie de Somme font le service tous les jours, donc il n’y a pas besoin de repartir de 0, c’est beaucoup plus rapide. Enfin on prend le service à 7h et le premier train est à 11h, donc il faut quand même 4h, le temps de préparer la machine, faire le point de charbon, d’eau, d’huile, etc.

Après avoir quitté la gare du Chambon, notre train va s'engager dans la partie la plus boisée du parcours.

Le Velay Express est exploité par l'association Les Voies Ferrées du Velay, sur une portion de l'ancien Réseau du Vivarais. Un ensemble comportant 200 Km de voies reliant les hauts plateaux ardéchois à la vallée du Rhône de Dunières ou Yssingeaux vers La Voulte sur Rhône ou Tournon par Lamastre et Le Cheylard permettant aux habitants de ces régions de rejoindre leur préfecture, ou aux citadins de venir s'aérer en moyenne montagne, le point culminant du réseau étant situé à plus de 1000 mètres d'altitude. Le trafic marchandise était essentiellement dédié au transport du bois. Sous la pression de la concurrence de la voiture et de l'autocar, le réseau sera fermé le 31 octobre 1968 et ses voies déposées à l'exception des sections Tournon-Lamastre et Dunières Saint-Agrève.

Nous voici justement arrivés au terminus de la ligne. Dans le dépôt, installé sur une banquette de l'éphémère "Flèche des Cévennes", nous retrouvons Michaël, un autre membre de l'association.

On est au dépôt de Saint-Agrève, c’est le terminus de la ligne. La ligne fait actuellement 27km, de Raucoules jusqu’à Saint-Agrèves, et Saint-Agrèves est le point culminant du réseau. Le reste du parcours s’effectue en Haute-Loire, la majeure partie du tracé, il y a seulement 3 kilomètres du tracé qui est fait sur l’Ardèche. C’est une petite embardée de 3km, et la gare est à 1045 m d’altitude.

Au-delà de Saint-Agrève, les trains poursuivaient leur parcours vers le Cheylard puis Lamastre et Tournon ou La Voulte sur Rhône.

Ce réseau s’appelait CFD, c’était la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux, c’était le réseau du Vivarais, c’était un réseau qui couvrait plus de 200km de voie métrique, à travers la Haute-Loire et l’Ardèche, la Haute Ardèche et la Basse Ardèche. De Saint-Agrève, vous pouviez aller sur Tournon, en passant par Le Cheylard ainsi que La Voulte sur Rhône.

L'aventure de la Compagnie des Chemins de Fer Départementaux qui avait commencée en 1881, date de sa fondation, s'achève avant la fin des années 60.

Elle s’arrête le 31 octobre 1968, date à laquelle le réseau a fermé, pour la voiture individuelle ainsi que l’autocar, qui avait concurrencé le chemin de fer, et ensuite le réseau s’est transformé en un réseau de chemin de fer touristique, donc il y a eu 2 lignes qui ont été sauvées in extremis : Tournon – Lamastre, 33km, et puis la nôtre, Dunières – Saint-Agrève, 37km. La nouvelle vie commence le 16 août 1970, c’est l’inauguration des CFR, c’était une société de chemins de fer régionaux, donc une société à capitaux, c’était un chemin de fer touristique, mais qui avait gardé les anciens horaires du chemin de fer départemental. Aujourd’hui, c’est exploité sous une forme plus classique depuis 1993, les voies ferrées du Velay se sont créées, l’association s’est créée en 1986, mais on a démarré l’exploitation en 1993. On a démarré entre Tence et Montfaucon dans un premier temps, ensuite la ligne a été ouverte sur Dunières, et en 2002 on a ouvert la partie restante entre Tence et Saint-Agrève.

Outre les trains à vapeur, l'association exploite et restaure d'anciens autorails qui ont circulés sur ces voies à partir de 1938.

On a 2 autorails actuellement en état de marche : on a l’autorail articulé Billard 222, qui est classé monument historique, qui date de 1938. C’est un autorail à 2 caisses, articulé, il y en avait 4 à l’origine, c’est l’unique exemplaire, classé monument historique. On a un autre autorail, un petit Billard A80D, de 150 chevaux, qui est actuellement aussi en service. Là, on est à bord de l’autorail billard 222. Cet autorail a porté le nom de « La flèche des Cévennes » en 1949 parce qu’elle assurait un service express entre La Voulte sur Rhône et Dunières. Il y avait une hôtesse à bord, derrière il y avait un petit compartiment, il y est toujours, il y avait un frigo derrière et une hôtesse qui était employée par la compagnie des chemins de fer départementaux, qui servait des boissons à bord de l’autorail. Le trajet durait bien 4h, pour 170km. C’était une liaison directe, il n’y avait pas besoin de changer, parce que des autorails La Voulte – Dunières, il n’y en avait pas beaucoup, il fallait souvent changer au Cheylard, ensuite faire une correspondance au Cheylard.

Pendant que certains des passagers du train de ce matin sont allés se restaurer dans le centre de Saint-Agrève, l'équipe de conduite a pris un peu de repos et assuré l'entretien courant et les vérifications d'usage de la machine. Notre train va maintenant pouvoir tranquillement redescendre vers Tence, et les passagers profiter d'une dégustation de produits locaux qui était proposée ce jour-là. Un voyage de retour qui se passera sans encombre, et nous ramènera en fin d'après-midi à notre point de départ.

Les voitures à bord desquelles prennent place les voyageurs proviennent de réseaux Suisses. L'ASD : Aigle Le Sépey Les Diablerets, et l'AOM (Aigle Ollon Monthey), le Nyon Saint-Cergue Morez, et les Chemins de Fer Rhétiques, mais également du réseau Breton. D'autres voitures ont été reconstruites sur la base d'anciens fourgons, par les bénévoles de l'association. Plusieurs locotracteurs peuvent également assurer le service ou être affecté aux servitudes telles les opérations de déneigement, l'hiver pouvant se faire rude et le manteau neigeux épais, dans ces contrées. Des wagons servant au transport de marchandises sont eux aussi très utiles aux bénévoles, lors des travaux sur la voie. A partir de la saison 2016, un nouveau wagon capable de transporter jusqu'à 10 vélos sera mis en service. Entre le ré-aménagement d'une autre voiture pour permettre dans un futur proche le service d'une restauration à bord, les travaux sur l'autorail 2012, ceux de construction d'un nouveau dépôt atelier à Raucoules et différents trains spéciaux organisés toute l'année, l'association des Voies Ferrées du Velay ne manque pas de projets.

Nous voici arrivés à la gare de Tence, pour le train à vapeur le parcours s'arrête ici. Pour les quelques voyageurs qui ont emprunté le train depuis Raucoules, le voyage va se poursuivre à bord d'un autorail Billard, qui fera l'aller-retour après que notre locomotive a fini de manœuvrer.

Pour Christophe, il est temps de faire un petit debriefing à chaud. C'était sa première journée d'apprenti mécanicien. Déjà chauffeur depuis quelques saisons, et mécanicien diesel, il s'apprête ainsi à son tour à monter en grade et aspire à décrocher ses galons de mécanicien vapeur.

C’était une journée chauffeur, puisque je suis titulaire, et en apprentissage mécano, parce qu’on n’en a jamais assez, et c’est quand même le summum à atteindre, devenir mécano vapeur après avoir été mécano diesel. En principe, on commençait d’abord par le mécano diesel, pour connaître le profil de la ligne, mécano autorail aussi, parce que c’est quand même vachement sympa à conduire, et le summum : maintenant qu’on a la vapeur, on y passe. C’est assez différent du diesel, parce que le diesel il y a toujours le moteur qui tourne, qui entraîne, alors que pour une locomotive à vapeur, on est très sensibles à la traction, et donc il faut connaître parfaitement la ligne, connaître les endroits où il faut accélérer, où il faut couper, et on est très sensibles à ça. C s’apprend, c’était le but de ma journée d’aujourd’hui. On a une ligne assez délicate, avec des profils en montée, en légère descente, des courbes avec un rayon court, ça ralenti le train, à des endroit l’herbe est haute, donc ce n’est pas facile, ça patine. Comme c’est une Mallet, on peut aussi régler la puissance sur le truck avant, pour une première fois je me suis concentré sur la partie arrière, et celui qui m’apprenait s’est occupé à ma place des autres. Quand on est en perte d’adhérence à ‘l’arrière, l’idée c’est de balancer la haute pression dans les cylindres avant, histoire que les cylindres avant aient plus de pèche et aident l’arrière à reprendre de l’adhérence.

Un résumé rapide de ce que qu'est le système Mallet. Et alors, à l'issue de cette première journée, on se sent comment ?

Je ne suis pas encore au point, mais c’était la première fois, donc on fera mieux la prochaine fois !

Car forcément, il y aura d'autres fois, jusqu'à ce que Christophe obtienne ses palmes académiques de mécanicien vapeur.

Je pense que ça va durer une bonne grosse saison, et si je ne suis pas bon ça durera un peu plus.

Mais pas d'inquiétude, la formation se fait sur le tas, et sous l'œil avisé de mécaniciens plus expérimentés, et comme la motivation est là, les choses devraient plutôt bien se passer pour Christophe, comme pour les autres membres de l'association qui sont passés par les mêmes étapes.

Les circulations du Velay Express se font en saison du 1er mai au 30 octobre les dimanches et jours fériés, des voyages supplémentaires sont organisés les mercredis et jeudis en juillet et en août, et quelques trains spéciaux comme celui du père Noël ou d'autres sont organisés tout au long de l'année.

La semaine prochaine dans Aiguillages : retour au Rail Miniature Caennais. Après le réseau à l'échelle 0 que vous avez pu découvrir il y a quelques semaines, nous parlerons des autres échelles pratiquées par ce club Normand.

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